Deux ans après Me Too et Balance ton porc, quels changements observés dans notre société ?
Selon une récente enquête de l’institut Ipsos, de nombreux Français et Françaises estiment que les mouvements Me Too et Balance ton porc ont engendré une libération de la parole des femmes mais parallèlement, 42% des interrogés légitiment un viol si la victime a eu une attitude provocante.
Largement diffusé sur les réseaux à partir d’octobre 2017, le hashtag Me Too a levé le voile sur le harcèlement et les agressions sexuelles subis par les femmes. Près de deux ans après le début de ce soulèvement féministe, l’institut de sondage français Ipsos, s’est penché sur les conséquences de cette mouvance mondiale, révélées par le journal 20 minutes. Malgré un affranchissement de la parole des femmes grâce à Me Too, les stéréotypes sur le viol sont encore bien présents.
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Les stéréotypes sur la sexualité féminine en baisse
Selon l’enquête, plusieurs évolutions de mentalité sont favorables et réconfortantes puisque 83% des personnes interrogées considèrent que Me Too a permis une libération de la parole des femmes et un renforcement de « leur capacité à porter plainte. » 69% des sondés estiment que les femmes seront « mieux soutenues par leur entourage et les témoins » face à de futurs harcèlements et agressions, et 57 % clament que Me Too a permis d’améliorer les relations entre les femmes et les hommes.
42 % des interrogés légitiment un viol si la victime a eu une attitude provocante
En dépit de cette progression rassurante, de multiples stéréotypes restent ancrés dans les moeurs, en particulier sur le viol. Selon l’enquête, 37 % des interrogés estiment qu’il est fréquent « d’accuser une personne de viol par déception amoureuse ou pour se venger » contre 32 % en 2016. Cette augmentation est due aux « accusations de délation » contre les femmes qui prennent leur courage à deux mains pour témoigner publiquement.
La culture du viol reste bien présente puisque « pour 42 % des Français, si une victime de viol a eu une attitude provocante en public, cela atténue la responsabilité de l’agresseur » , consolidant le « mythe de la bonne et mauvaise victime » selon 20 minutes. Cette minimisation du viol crée alors énormément de culpabilité chez la femme et celle-ci est reste toujours la fautive dans l’histoire : « Lors des procès d’agresseurs sexuels, on demande encore trop souvent à la victime la tenue qu’elle portait, si elle avait des amants, si c’était une femme légère » estime Nolwenn Weiler, co-autrice de Le viol, un crime presque ordinaire.
Moins de 10% des femmes victimes de viol osent porter plainte
Avec une médiatisation du harcèlement et des agressions sexuelles, beaucoup pensent que certaines choses ont changé comme le nombre de plaintes déposées et les condamnations pour viols. Selon l’Ipsos, 69 % des personnes interrogées sont convaincues « qu’une victime de viol sur quatre porte plainte, alors qu’elles sont en réalité moins de 10% à le faire« et 90 % pensent que les condamnations pour viols ont augmenté, alors que le nombre de personnes condamnées pour ce crime a chuté de 40 % en dix ans.
Le principe du consentement et du « non » est encore loin d’être acquis par tous puisque 12 % des interrogés sont d’avis « qu’il n’y a pas viol lorsque la personne est incapable d’exprimer un consentement » contre 8 % en 2016. Pour Alice Debauche, docteure en sociologie: « ces stéréotypes ont pour fonction de proscrire les comportements légitimes des femmes (…) C’est une forme de contrôle de la sexualité des femmes. »