Attention, cette maladie que l’on pensait disparue fait son retour
L’augmentation des hospitalisations pour des cas de scorbut est estimée à 34,5 % depuis le début de la pandémie de Covid-19, selon une nouvelle étude publiée le 6 décembre 2024 dans la revue The Lancet Regional Health – Europe. Cette réémergence inquiète les spécialistes, car cette maladie, causée par une carence grave en vitamine C, semblait presque éradiquée dans les pays développés.
Une maladie oubliée mais dévastatrice
Le scorbut, une pathologie que l’on associe souvent aux marins des ères passées, fait son retour de manière alarmante chez les enfants en France. Cette maladie survient lorsque l’organisme manque sévèrement de vitamine C, un élément essentiel à notre santé. Or, le corps humain ne peut ni produire ni stocker cette vitamine, dépendant exclusivement de l’alimentation pour s’en procurer.
En cas de carence profonde, les symptômes apparaissent rapidement :
- Douleurs articulaires intenses et faiblesse musculaire ;
- Hémorragies internes ou externes (notamment au niveau des gencives) ;
- Risques de défaillance cardiaque en l’absence de traitement.
« Sans traitement approprié et rapide, le scorbut peut être mortel », précise l’Inserm.
Autrefois largement répandu parmi les populations pauvres ou les navigateurs privés d’aliments frais, le scorbut avait presque disparu des pays riches grâce à une meilleure accessibilité alimentaire. Cependant, une étude récente indique que cette maladie fait un retour remarqué chez les plus jeunes en France.
Une hausse de 34,5 % des cas depuis la pandémie
L’étude publiée dans The Lancet Regional Health – Europe a comparé deux périodes distinctes : avant la pandémie (2015-2020) et après son début (2020-2023). En analysant les données collectées via le système PMSI (programme de médicalisation des systèmes d’information), les chercheurs ont constaté une augmentation significative des hospitalisations pour scorbut chez les moins de 18 ans.
En chiffres :
- 888 patients ont été hospitalisés pour scorbut sur une période de neuf ans ;
- Une hausse de 34,5 % des cas a été enregistrée depuis 2020 ;
- Parallèlement, une augmentation de 20,3 % des cas de malnutrition sévère a été signalée.
Selon l’Inserm, cette progression pourrait être liée à des facteurs sociaux, économiques et environnementaux. « La crise sanitaire mondiale et l’inflation, atteignant +15 % en début 2023, ont aggravé l’insécurité alimentaire, » souligne le rapport. Ces événements ont entraîné une dégradation de l’état nutritionnel de nombreux enfants.
« Bien que le lien de cause à effet ne soit pas pleinement établi, il est jugé plausible par les chercheurs », ajoute l’étude.
Une alimentation déséquilibrée en cause
Les changements d’habitudes alimentaires jouent un rôle clé dans cette réémergence. La précarité croissante et les crises sociales ont entraîné une diminution de l’accès à des aliments frais et riches en vitamine C, notamment les fruits et légumes.
Or, pour éviter le scorbut, il est indispensable de consommer régulièrement des aliments riches en vitamine C, comme :
- Les agrumes (orange, citron) ;
- Les kiwis, fraises, papayes ;
- Les légumes verts tels que le brocoli, le chou frisé ou les poivrons.
« Malheureusement, la hausse des prix et la baisse du pouvoir d’achat privent de nombreuses familles d’une alimentation nutritive et équilibrée », déplore un spécialiste.
Les recommandations pour éviter une crise sanitaire
- La mise en place de programmes d’aide alimentaire ciblés afin de soutenir les familles les plus précarisées.
- Améliorer l’accès à des aliments nutritifs et abordables, notamment via des politiques publiques favorisant la production locale.
- Renforcer la formation des professionnels de santé pour détecter précocement les carences alimentaires chez les enfants.
« Ces mesures sont essentielles pour enrayer la progression de cette maladie évitée depuis des décennies dans nos sociétés », insiste l’Inserm.
Un signal d’alarme pour les sociétés modernes
Le retour du scorbut en France est le révélateur d’un problème plus large : la fragilité du système alimentaire face aux crises. Entre pandémie, inflation et précarité croissante, les enfants sont les premières victimes de cette situation.
« Il est impératif de réagir rapidement pour prévenir d’autres conséquences graves sur la santé publique« , conclut le rapport. Les efforts conjoints des gouvernements, des associations et des individus seront nécessaires pour garantir un accès à une alimentation saine et équilibrée pour tous.
La prévention : un enjeu éducatif
Outre les mesures politiques, la sensibilisation des familles à l’importance d’une alimentation riche en nutriments est cruciale. Les programmes éducatifs pourraient inclure des initiatives scolaires pour promouvoir la consommation de fruits et légumes. Des campagnes de communication grand public peuvent également encourager des choix alimentaires sains.
« Une meilleure éducation alimentaire pourrait faire la différence, notamment dans les zones les plus touchées par la précarité », explique un nutritionniste.
De plus, l’implantation de jardins communautaires dans les zones urbaines pourrait aider les familles à accéder à des produits frais tout en renforçant le lien social.