Élisabeth Borne : doit-on l’appeler « Premier » ou « Première » ministre ?
Le verdit est tombé : Élisabeth Borne a officiellement été nommée à Matignon. Peu habitués à avoir une femme à ce poste si important, on se demande tous s’il faut dire « Premier » ou « Première ministre » . Qu’en pensent les linguistes ?
Élisabeth Borne a fait son choix
Alors que Jean Castex va retourner dans ses Pyrénées natales, Élisabeth Borne fait ses premiers pas à Matignon. Trente ans après Édith Cresson, nommée Première ministre en 1991 par François Mitterrand, elle devient la seconde femme à exercer cette fonction.
Si sa prédécesseur préférait l’appellation Premier ministre, qu’elle jugeait « seul à même de marquer, à ses yeux, le degré d’élévation de cette charge » , Élisabeth Borne n’est pas de cet avis. Pour elle, ce sera Première ministre. Emmanuel Macron a d’ailleurs utilisé cette appellation pour officialiser son choix sur son compte Twitter.
Chère @Elisabeth_Borne,
Madame la Première ministre,
Écologie, santé, éducation, plein-emploi, renaissance démocratique, Europe et sécurité : ensemble, avec le nouveau gouvernement, nous continuerons d’agir sans relâche pour les Françaises et les Français.— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) May 16, 2022
Ministre est un mot épicène, donc l’adjectif qui le précède peut être féminin ou masculin. L’Académie Française confirme ce fait et estime qu’il est tout à fait correct de dire Première ministre : « au sommet de l’État, et pour ce qui regarde plus particulièrement les charges confiées aux membres du gouvernement, la féminisation s’opère usuellement sans contrainte » .
Interrogée par France Live, la linguiste Julie Neveu se réjouit de ces bizarreries françaises et indique : « Il faut se détendre avec la langue. Dans l’usage de la langue, il n’y a pas de règle absolue. La règle essentielle est de se faire comprendre par la plus grande partie des locuteurs » .
Pour certains, ça ne passe pas
Invité sur RTL le mardi 17 mai, Éric Zemmour a refusé de qualifier Élisabeth Borne de Première ministre car cette tournure lui semble « moche à l’oreille » . Il fait partie des nombreux conservateurs attachés à la règle du masculin qui l’emporte sur le féminin.
https://twitter.com/AgaHamel/status/1526223657642647552?s=20&t=TxBX8frZ1zCw2yB-BSjjSw
Pourtant, la langue évolue et suit les tendances. Peu à peu, on assiste à un phénomène de féminisation des noms de métiers, auquel vient s’ajouter le poste de Première ministre. Pour Julie Neveu, « c’est perturbant parce qu’entre la norme et l’usage, certains ne savent pas très bien où se situer » . Elle ajoute que « d’ici 5 à 10 ans, plus personne n’hésitera à marquer le féminin. ‘La Première ministre’ deviendra l’emploi prépondérant » .