Destitution d’Emmanuel Macron : ce que l’on sait
Près d’un mois et demi après les élections législatives anticipées, Emmanuel Macron n’a toujours pas désigné de Premier ministre, laissant la France sans gouvernement. Alors que la trêve politique des Jeux olympiques est désormais passée, la menace d’une destitution plane sur la tête du président.
Emmanuel Macron affaibli en pleine crise politique
À l’issue des élections européennes durant lesquelles les Français ont placé le Rassemblement national en tête des votes, Emmanuel Macron a pris une décision à laquelle personne ne s’attendait. Reconnaissant sa défaite, le président de la République a fait le choix de dissoudre l’Assemblée nationale.
Une décision qui a mené à la tenue de nouvelles élections législatives anticipées. Un choix du président qui a vivement été critiqué par son entourage. Bruno Le Maire assurait que c’était la « décision d’un seul homme », quand Gabriel Attal a tenté de dissuader le chef de l’État.
Il faut dire que la décision était particulièrement risquée puisque le camp présidentiel risquait de perdre sa majorité à l’Assemblée nationale. C’est en effet ce qui s’est passé puisque c’est l’alliance des partis de gauches (Nouveau Front populaire) qui est arrivée en tête des suffrages.
La nomination du nouveau Premier ministre se fait attendre
À la suite de ce résultat, Gabriel Attal a déposé sa démission comme le veut la tradition. Si Emmanuel Macron l’a refusée dans un premier temps, il a fini par l’accepter. Mais l’ancien Premier ministre a gardé ses fonctions en attendant de connaître le nom de son remplaçant.
Le chef de l’État ne semble pas pressé de nommer un nouveau Premier ministre. Alors que l’opposition espérait un changement rapide du gouvernement, le président a annoncé la mise en place d’une trêve politique durant les Jeux olympiques, repoussant encore la désignation du nouveau locataire de Matignon.
Mais depuis la fin de la trêve olympique, Emmanuel Macron ne semble pas s’activer davantage. Ça fait désormais six semaines que le remplaçant de Gabriel Attal n’a pas été désigné. Mais le chef de l’État devrait se décider dans les prochains jours. Le vendredi 23 août, il recevra l’ensemble des chefs de parti et des présidents des groupes parlementaires.
« La nomination d’un premier ministre interviendra dans le prolongement de ces consultations et de leurs conclusions », précise l’Élysée. Lors de ces échanges, Emmanuel Macron espère faire naître « une majorité la plus large et la plus stable au service du pays ».
Emmanuel Macron menacé d’une destitution
Si Emmanuel Macron n’est pas pressé, d’autres sont visiblement fatigués d’attendre. Alors que le Nouveau Front populaire a proposé Lucie Castets au poste de Première ministre, la France insoumise perd patience et menace le chef de l’État d’une destitution.
« Il est évident que le refus de prendre acte d’une élection législative et la décision de passer outre constituent un manquement condamnable aux exigences élémentaires du mandat présidentiel », ont averti Jean-Luc Mélenchon, Mathilde Panot et Manuel Bompard dans un texte publié par La Tribune dimanche.
Un « avertissement » lancé à Emmanuel Macron qui a suscité de nombreuses réactions et oppositions du gouvernement jusque dans le camp du Nouveau Front populaire. Olivier Faure, le Premier secrétaire du Parti socialiste, a réagi, indiquant qu’il ne partageait pas cette volonté : « Cette tribune n’est signée que par les dirigeants de LFI. Elle n’engage que leur mouvement ».
La procédure de destitution peut-elle aboutir ?
Mais la menace de destitution de la France insoumise peut-elle vraiment être appliquée ? D’après l’article 68 de la Constitution française : « Le président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat« .
La demande de destitution n’a, en théorie, aucune chance d’aboutir au vu des équilibres parlementaires. La demande de destitution doit être déposée par un dixième des députés, puis votée par les deux tiers des députés à l’Assemblée nationale, puis par les deux tiers des sénateurs.
Si la France insoumise, qui compte entre 70 et 80 députés, peut déposer seule sa demande à l’Assemblée nationale, la suite du processus s’annonce compliquée. Il semble impossible que deux tiers des députés votent pour, de même pour le Sénat.
Une procédure qui parait donc fastidieuse, pourtant la France insoumise assure que l’éventualité d’une destitution est crédible. « Nous avons un dixième des députés, et (…) aujourd’hui, les députés qui soutiennent le président représentent moins d’un tiers », explique Manuel Bompard. L’insoumis que « c’est une possibilité crédible, mais c’est un avertissement ».
Emmanuel Macron semble donc assez protégé par cette menace de destitution. D’autant que le temps de rassembler des sympathisants pour LFI, le président aura sans doute désigné un nouveau Premier ministre.
À noter que depuis son entrée en vigueur, l’article 68 n’a été utilisé qu’une fois. C’était en 2016, des députés LR avaient lancé une procédure de destitution contre François Hollande après la révélation de confidences classées secret-défense dans le livre Un président ne devrait pas dire ça… Une proposition qui a été rejetée dès son examen par le bureau de l’Assemblée.