Hugues Aufray : ce terrible secret de famille qui l’a dévasté
Des tubes, Hugues Aufray en a fait à la pelle ! C’est l’évidence, en écoutant ses refrains, on comprend qu’ils n’ont pas pris une ride. D’ailleurs, faites le test autour de vous. De 7 à 77 ans, vos proches en connaissent forcément un bout. Au cours de sa carrière, il a pu croiser la route d’immenses vedettes comme le culte Bob Dylan.
Forcément, des anecdotes avec ces célébrités étrangères il en a à revendre ! Bienveillant et surtout humble, il n’hésite pas à distiller de précieux conseils à la nouvelle génération. Cependant, une fois les concerts achevés, ses fantômes reviennent le hanter. Qui, quand, où, comment, on va tout vous raconter dans les moindres détails.
Les trois passions du jeune Hugues Aufray
Quand la Seconde guerre mondiale éclate, les parents d’Hugues Aufray se séparent. Avec sa mère, ses deux frères aînés et sa cadette, ils prennent la direction de la ville de Sorèze, dans le Tarn. Au plus profond de son âme, il conserve précieusement des épisodes de sa scolarité dans ce collège dominicain.
D’abord, un professeur d’équitation flaire le potentiel de ce jeune cavalier. « Il a repéré en moi des qualités exceptionnelles et me prendra sous sa protection« . Ensuite, il n’aime pas les matières générales et préfère focalise son attention sur les artistiques. Entre deux peintures ou sculptures, il intègre la fanfare, puis la chorale du village.
Un mélomane pas comme les autres
À la Libération, Hugues Aufray rejoint son père en Espagne. Sa manière de résumer ses trois années passées au lycée français de Madrid ne laisse personne indifférent. Partagé entre la « mélancolie et la nostalgie« , il souligne que « riche ou pauvre, tout le monde chantait et dansait à la moindre occasion. »
Voulant à tout prix devenir peintre, Hugues Aufray revient en France en 1948. Son objectif ? Intégrer les bancs de la prestigieuse école des Beaux-Arts. À l’aise avec sa guitare, et pour subvenir à ses besoins, il chante en espagnol des tubes de ses modèles français. Dans de les rues ou dans quelques cabarets de la capitale, il se crée une petite réputation. A la fin des années 50, la chance lui sourit enfin.
Grâce au soutien de ses proches, il se jette à l’eau et participe à un concours organisé par la station radio Europe 1. Arrivé en second position avec sa reprise du « Poinçonneur des Lilas », il n’est pas au bout de ses surprises. En effet, sa prestation titille la curiosité du producteur Eddie Barclay. A l’instar de Patrick Juvet, ce dernier lui propose de signer un contrat dans sa maison de disques.
En écoutant les premières notes de cet hymne de marins anglais, Hugues Aufray a un déclic. Très vite, il sollicite l’aide du parolier Jacques Plantes. D’un commun accord, les deux hommes décident de changer le rythme. La suite, on la connaît sur le bout des doigts. Dès sa sortie, ce vinyle se vend comme des petits pains. Plusieurs décennies après, c’est un modèle du genre !
Des rencontres déterminantes
C’est un fait, les stars françaises de l’époque ne se reposent pas sur leurs lauriers. Et pour cause, ils tentent souvent leur chance de l’autre côté de l’Altantique, aux Etats-Unis. C’est notamment le cas d’Edith Piaf ou encore de Maurice Chevalier. D’ailleurs, attendri par la fougue du trentenaire Hugues Aufray, il lui propose de le rejoindre à New York. Reperé par la direction du « Blue Angel », il accepte d’être à l’affiche pendant un an.
Bob Dylan
Dans les coulisses de ce cabaret, rien ne se déroule comme prévu. Non seulement, il parvient enfin à trouver son genre musical. Mais en plus, ses nouveaux amis ne tarrisent pas d’éloges à son sujet. Aussi, entre deux tours de chant, ils vont lui présenter leur mentor, Bob Dylan. « C’est un souvenir indescriptible, j’avais l’impression purement instinctive que c’était la chose la plus importante que j’avais vue de ma vie alors que je ne comprenais pas un mot d’anglais.«
On l’a compris, ce séjour d’à peine un an va remet tout en question. Dès son retour, le chanteur passe de la théorie à la pratique. Vu qu’il est le seul à avoir l’autorisation écrite et orale de remanier des titres de son ami, il rivalise d’ingéniosité. Force est de constater que cet album dédié est un carton.
Ironie du sort, un demi-siècle après leur rencontre, l’admiration et le complicité sont intactes. En juillet 1984, Hugues Aufray partage la scène du Parc du Sceaux avec lui. Ce duo sur « The times they are a-changin » est ancré à jamais l’esprit des admirateurs de la première heure !
Hugues Aufray, un homme engagé
Lorsque Mort Shuman compose « Celine », il pense d’abord à Claude François. Cependant, au vu du succès de l’entrenant « J’attendrai », ce dernier refuse d’inclure cette tendre balade dans son répertoire endiablé. S’emparant de la perche, Hugues Aufray l’inclut sur cet EP.
Bien plus tard, il va apprendre que sa douce mélodie a inspiré une mère de famille canadienne. A la tête d’une tribu de treize enfants, Thérèse Dion peine à joindre les deux bouts. « Quand on lui a annoncé qu’elle était enceinte, elle a dit à son mari : ‘On n’a pas assez d’argent, on est trop pauvre, on ne peut pas garder le bébé (…) Puis elle a entendu la chanson et elle était bouleversée. Elle a dit à son mari : ‘On garde le bébé et si c’est une fille elle s’appellera Céline » Eh oui, comme vous l’avez sans doute deviné, la femme de René Angelil a une dette envers Hugues Aufray.
La même année, via son producteur, Hugues Aufray a l’immense privilége de chanter avec Harry Belafonte. Cerise sur le gâteau, il a la chance inouïe d’échanger quelques mots avec le pasteur Martin Luther King. De ce serrage de main d’à peine quelques secondes avant ce concert contre le racisme au Palais des sports, le poète conserve précieusement la « douceur de son sourire incroyable ».
Quelles sont les autres passions d’Hugues Aufray ?
Quand il a eu un peu d’argent, Hugues Aufray fait un placement pas comme les autres. En effet, quand il n’est pas sur scène, il prend la poudre d’escampette et se ressource dans son havre de paix. En compagnie de ses trois chevaux, il se sent bien. C’est pourquoi, à l’aide de stages pour enfants, de spectacles pour les grands et même de quelques chansons, il transmet sa passion dévorante.
Comme nous l’avions mentionné au début de cette enquête, Hugues Aufray a toujours eu une attirance pour la peinture, mais aussi la sculpture. Et quel bel hommage à ses peintres préférés (Cezanne, Van Gogh) mais aussi à son complice Bob Dylan que le façonnage de ces magnifiques bronze ? De l’avis de son auteur, « c’est une façon de dire merci à la vie » !
Qui sont les deux femmes d’Hugues Aufray ?
En 1951, Hugues Aufray est encore inconnu du public. Amoureux, il se marie avec la danseuse Hélène Faure. De cet amour va naître deux filles, Marie et Charlotte. Amusé, il raconte qu’avec ses tous premiers cachets, il surprend son entourage. Contrairement aux autres, les belles voitures ne l’intèressent pas. Par contre, il investit dans l’immobilier. Vendue à un prix dérisoire, il acquiert « une ferme en Ardèche » et utilise ses économies pour « la restaurer complètement« . Lavante, cheptel de 50 chères, il n’a pas le temps de s’ennuyer !
A quelques rares occasions, Hugues Aufray accepte d’ouvrir les portes de son jardin secret. Il avoue à sa manière qu’il n’a « pas toujours été fidèle« à la mère de ses enfants. « On partait parfois deux, trois mois en tournée… vous savez, c’est difficile pour un garçon de 30 ou 35 ans. »
Au cours d‘une tournée en 1995, il signe un autographe à une jeune fan. Très vite, Murielle lui confie son envie de percer dans le septième art. Attendri, ce bienveillant de nature va la prendre sous son aile. Au cours de leurs nombreux échanges epistolaires, il lui déclare. « Une lumière se dégage de vous et je suis certain que vous réussirez dans ce domaine ! Si vous avez besoin de relations dans le métier, je pourrai peut-être vous aider. »
Quelques mois après la mort de sa première femme, Hugues Aufray se remarie avec sa dulcinée Muriel à l’église Saint-Vigor de Marly-le-Roi. Peu importe les critiques sur leur différence d’âge, le chanteur semble plus épanoui que jamais.
Hugues Aufray, le dernier survivant
Francesco
Dans l’émission « la boite à secrets », Hugues Aufray est à la croisée des chemin. Face à Faustine Bollaert, il n’a pas le choix que de se replonger dans son passé. Aussi, lorsqu’il voit la photo de son frère, l’émotion l’envahit. « Il avait juste un an de plus que moi. Mais il mesurait 25 centimètres de plus que moi. Maman l’avait baptisé « Francesco » à cause de St François d’Assise qui parlait avec les animaux. Je l’appelais Caco.«
C’est l’évidence, Hugues Aufray garde précieusement tous ces instants de complicité avec son aîné. « Quand on était petits, mon frère m’apprenait plein de choses. On se baladait dans la montagne pour voir les animaux parce qu’il leur parlait. Il emmenait tout le temps la gourde.«
En quelque sorte, il a pris la place de son père absent. « C’est lui qui m’a appris à lire et à écrire. Il était d’une beauté physique et il avait une voix naturelle d’opéra. » Lorsqu’il s’envole pour New-York, puis pour le Canada, il a la ferme intention d’en faire son métier. Hélas, victime d’un chagrin d’amour, il se suicide.
Perdu sans son modèle, Hugues Aufray fait une curieuse confidence. « Je n’avais pas du tout la vocation d’être un grand chanteur (..) Je suis devenu modestement ce qu’il aurait fait d’une façon beaucoup plus brillante »
Pascale
Dès son plus jeune âge, la cadette de la famille semble attirée par la danse classique. Après avoir intégré la distribution du film « À la Jamaïque« , elle décroche un contrat dans un mythique cabaret parisien.
A la fin des années 50, la soeur d’Hugues Aufray décroche le premier rôle d’une pièce pas comme les autres. Dix ans après la fin de la seconde guerre mondiale, la publication du journal de la jeune Anne Franck bouverse le monde entier.
Presque en même temps, le cinéma va dérouler le tapis rouge à la dernière de la tribu. Dans la filmographie de la comédienne, il y a un avant et après le tournage de « L’eau Vive ». La qualité du cénario, la chanson du générique de Guy Beart, tous les ingrédients sont réunis. De son côté, Hugues Aufray est admiratif et respecte infinement la carrière de sa protégée.
Hélas, au mois de juillet 2020, le précieux équilibre d’Hugues Aufray vascille. De surcroit, sur cette route départementale, un camion fauche la route de l’actrice. Assisse à la place du passager, et malgré ses blessures, elle se rend compte de l’ampleur des dégâts. Même si le conducteur est mort, elle parvient néamoins à survivre jusqu’à l’arrivée des pompiers. Hélas, au cours du trajet d’ambulance l’emmenant à l’hôpital, « le plus beau visage du cinéma français » s’envole au paradis des artistes.
Pour affronter ce nouveau drame, Hugues Aufray se réfugie encore dans la musique. Dès qu’il en a l’occasion, il invite le public à fredonner avec lui les paroles de « L’eau vive ». A presque 100 ans, il n’a plus rien à prouver mais tant encore à nous donner !