18h par jour, salaire à 3 centimes, quand Shein flirte avec l’esclavage
Face à son succès, Shein, la marque favorite des adolescentes, a titillé la curiosité des ONG et de certains médias. C’est le cas de la chaîne de télévision britannique Channel 4 qui a partagé il y a une semaine un documentaire sur les coulisses bien sombres de l’entreprise. Société phare de la fast-fashion, les images sont choquantes.
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Des articles à bas prix, un choix très varié des marchandises et bien sûr une quantité astronomique de stocks. Untold : Inside the Shein Machine révèle l’indécence du système du géant de la fast fashion.
Des conditions de travail inhumaines chez Shein
Avec l’ajout de milliers d’articles chaque jour, cette marque aurait créé la notion d’ultra fast-fashion. Pour permettre la production de cette quantité colossale de vêtements et d’accessoires, il y a bien évidemment des petites mains.
Les salariés de l’entreprise travaillent jusqu’à 18 heures par jour sans parler de jours de congé. Avec une rémunération qui équivaut à 560 euros par mois, cette somme mensuelle peut parfois baisser. En effet, certains employés voient leur salaire se diviser à chaque fois qu’ils commettent une erreur sur la chaine d’assemblage ou dans les colis. D’autres en revanche sont payés à l’article, soit 0,03 euro par vêtement confectionné. L’ONG Public Eye avait déjà publié, au mois de juin, un rapport montrant qu’il n’y a ni contrat ni assurance pour les ouvriers de Shein.
Des images choquantes ont appuyé ces révoltantes découvertes. Le documentaire britannique montre une femme qui n’a pas d’autre choix que de se laver les cheveux sur son temps de pause. Ou un homme torse nu devant sa machine à coudre. Bien qu’épuisé, il explique à la journaliste qu’il ne s’arrêtera pas avant le milieu de la nuit.
Greenwashing et mensonges
Suite à la diffusion de ce documentaire, Shein a tenté de donner quelques explications en réponse à ces images.
« Nous sommes extrêmement préoccupés par les affirmations présentées par Channel 4, qui violeraient le code de conduite accepté par chaque fournisseur de Shein. Tout manquement à ce code est traité rapidement, et nous mettons fin aux partenariats qui ne répondent pas à nos normes. Nous avons demandé des informations spécifiques à Channel 4 afin de pouvoir enquêter » .
Porte-parole de l’entreprise pour le journal City A.M.
Les conclusions tirées par cette investigation tombent mal, puisque depuis le début de l’année, l’entreprise cherche à lever des fonds. Une quête qui se complique malgré les prises de consciences environnementales et l’étonnement de la société face aux confessions des ouvriers.
La fast fashion est un des nœuds de la crise climatique, chaque année, elle représenterait 10% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Shein a dévoilé il y a quelque temps un programme de réduction de ses conséquences écologiques, voulant abaisser de 25% ses gaz à effet de serre d’ici 2030.
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Des commentaires sans surprise
Dans les commentaires, peu de révoltes et d’étonnements. Comme si ces méthodes de travail étaient plus ou moins consenties par les acheteurs. Depuis quelques mois, Shein est percé à jour. Au-delà des conditions de fabrication qui flirtent avec l’esclavage moderne, son système de communication a, lui aussi, été étudié. Une intelligence artificielle réussirait à prédire les prochaines tendances grâce aux réseaux sociaux. Le site internet a été étudié pour inviter les utilisateurs au « scrolling » . Des pratiques douteuses qui toutefois ne contrebalancent pas avec la crise économique. Les principales clientes de l’entreprise sont les étudiantes pour qui s’habiller bien et pas cher est un véritable objectif.
De nombreuses marques de vêtements utilisent les mêmes pratiques sans pour autant perdre leurs clients. Alors que le député européen Raphaël Glucksmann dénonce les conséquences désastreuses de la mode rapide, les commentaires Instagram, eux, sont sans appel : la situation n’est pas près de changer.
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« Il faudrait que toutes les pseudos influenceuses arrêtent leur partenariat avec cette marque«
« Il n’y a pas de loi pour interdire ces entreprises d’avoir accès au marché français ? Sinon, ce ne serait pas possible d’en faire une ? » .
« Le problème, c’est que d’autres grandes enseignes telles que H&M, Zara, Gemo, La Halle, etc fonctionnent à peu près de la même façon… Alors que faire, si on n’a pas le budget pour s’acheter des vêtements mode en France et conçu de la manière la plus éthique qui soit… » .
« À partir du moment où on achète des produits fabriqués en Asie ou en Afrique, faut fermer les yeux sur les pratiques douteuses » .
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