« Je perds ma vue chaque jour » : Jessica Hugues, championne de karaté bientôt aveugle, nous raconte son combat (vidéo)
La vie de Jessica Hugues a été semée d’embuches. Cette championne de karaté a un palmarès impressionnant malgré sa malvoyance. Atteinte d’une maladie dégénérative de la rétine, la jeune femme est condamnée à devenir aveugle. À l’occasion de la sortie de son livre, Combattante pour la vie, Jessica s’est confiée dans une interview exclusive.
Jessica Hugues, sportive de haut niveau malgré son handicap
Jessica Hugues est l’une des meilleures karatékas de sa génération. Son palmarès est impressionnant. Elle a été championne du monde juniors en Malaisie en 2011, championne d’Europe dans l’équipe senior et a obtenu la troisième place aux Championnats du monde de Paris en 2012 à tout juste 18 ans. Qui pourrait croire avec ce parcours que la sportive est malvoyante ?
En effet, Jessica Hugues est atteinte d’une dégénérescence de la rétine. Une maladie découverte lorsqu’elle était enfant, à seulement cinq ans. « À l’école, je ne voyais pas le tableau, je me plaignais de problème de vue » explique-t-elle. Mais le diagnostic ne sera établi qu’à l’âge de 12 ans : elle a la maladie de Stargardt. « Je perds ma vue chaque jour, chaque année, normalement ça se termine par une perte totale de la vision » confie la jeune femme. À 28 ans, Jessica Hugues nous explique qu’elle a déjà perdu la totalité de sa vision centrale. Plus elle vieillit et plus, elle perd ses yeux, et deviendra un jour aveugle.
Mais Jessica découvre un endroit où elle oublie sa maladie : le sport, plus précisément le karaté. « Le karaté, ça a été l’école de ma vie, ça a été un sens à ma vie. C’était le seul endroit où je ne me sentais pas handicapée » raconte la jeune femme. Un handicap qu’elle a longtemps caché afin de performer dans le sport de haut niveau chez les valides. « Je l’ai caché toute ma carrière que c’était compliqué » résume la karatéka.
Sa vie a failli basculer lors d’un accident en plein combat
Alors qu’elle est en pleine ascension dans sa carrière sportive, tout a failli s’arrêter. « En 2015, il y a eu cet accident en plein combat où je suis tombée sur la cervicale, je me suis fracturée la C1 » se souvient Jessica Hugues. Alors qu’elle était condamnée à ne plus jamais marcher et à finir paralysée, elle va déjouer les pronostics des médecins.
« Lorsqu’on m’a dit que je ne remarcherais peut-être plus jamais, quand on dit ça à une malvoyante qui va perdre ses yeux… La question ne se pose même pas » explique-t-elle avec beaucoup d’émotion. « Je ne pouvais pas ne pas remarcher, je ne pouvais pas perdre l’usage de mes jambes, mes bras et ensuite mes yeux« raconte la jeune femme.
La jeune sportive parviendra donc à remonter la pente et à revenir dans l’équipe de France de karaté seulement un an et demi après cet accident. Si sur les tatamis, elle oublie qu’elle est malvoyante, sa vie à l’extérieur lui rappelle quotidiennement.
Comment gère-t-elle son quotidien en tant que malvoyante ?
Pour compenser la perte de sa vue, Jessica Hugues se sert évidemment de ses autres sens qui se sont développés : « Pour ma part, l’odorat et l’ouïe sont très développés ». « Si on me juge sur l’apparence, on va absolument pas se rendre compte de mon handicap et on va penser que je suis très indépendante » explique la jeune femme.
Mais la réalité est tout autre. Elle confie être dépendante à quasiment 100 % de son compagnon. Son quotidien n’est évidemment pas simple puisque pour Jessica des tâches du quotidien comme cuisiner sont presque impossibles. Maman d’une petite fille de quatre ans, c’est aussi très difficile à gérer. « Je ne suis pas une maman comme tout le monde qui peut lire des histoires. Je fatigue très vite pour la surveiller. Un quotidien avec un enfant on a besoin de ses yeux » détaille la sportive.
Si Jessica Hugues a choisi d’écrire un livre, c’est pour mettre en lumière sa maladie. Elle regrette le manque de recherches au sujet de cette maladie. « Si c’est pas moi qui en parle qui le fera ? » questionne-t-elle. « Peut-être qui sait que grâce à mon livre, dans 10 ans, j’aurai toujours l’honneur de voir ma fille » espère Jessica.